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Démocratie en danger, par David Manise


Publié le 15 janvier 2025. Par Cloé Lachaux.

Ou comment survivre à la fracture

David Manise, Démocratie en danger. Comment nos clivages sont amplifiés pour fragiliser notre société, Editions Bold, 2022

Arrivé en France en 2000, le Canadien David Manise est instructeur de survie, anthropologue, auteur et conférencier. Fort de son expertise en matière de leadership, de survie et de gestion du stress, il puise dans ces domaines pour enrichir son livre. S’appuyant sur ses expertises atypiques, il tente de comprendre les raisons des conflits, de l’agressivité et de la colère dans notre société actuelle et cherche à retrouver le débat et la discussion, essentielles au bon fonctionnement de la démocratie. En bref, “abattre quelques murs” pour “construire quelques ponts”. 

 

Les raisons de la violence de nos désaccords

En tant que “survivologue”, David Manise s’intéresse à la nature humaine, à la force de nos oppositions et aux raisons cognitives de nos désaccords. Il en tire le postulat que nos systèmes de valeurs et de croyances peuvent être à la fois communs, complémentaires et concurrents, et que la violence avec laquelle on les exprime est loin d’être nouvelle : elle traduit une volonté de survie, de liberté ou de dominance.

Ces oppositions sont renforcées par l’appartenance à des groupes, réunis autour de valeurs et croyances communes qui leur permettent de coopérer. Ces groupes excluent ceux identifiés comme les “autres”, qui ne partagent pas ces valeurs et croyances. Ils ont donc tendance à mettre une distance entre le “nous” et le “eux”. Cela favorise un sentiment de défiance qui se traduit généralement par une perte de confiance réciproque et une remise en question du socle narratif (ici national) commun.

Avec l’essor des réseaux sociaux et la capacité à s’exprimer librement, le sentiment de défiance et les fractures entre différents groupes sont exacerbés. Le mode de fonctionnement d’Internet et des réseaux sociaux, plus particulièrement leurs algorithmes, sclérosent et consolident effectivement ces croyances et ces opinions, en favorisant des groupes de pensées homogènes et peu enclins à changer d’avis, amenuisant ainsi la possibilité d’un débat de fond.

L’enjeu, pour les élus, comme pour les citoyens, est donc de regagner une confiance réciproque, une stabilité, une sécurité et de faire accepter et adopter massivement un narratif cohésif. 

 

Des méthodes pour regagner une confiance réciproque

En premier lieu, David Manise pense que l’un des sédiments d’une démocratie du dialogue est de rétablir la confiance entre la population et la classe politique, en repensant la manière dont le leadership s’exerce, en décentralisant le pouvoir et en accordant plus de pouvoir pratique aux citoyens. 

Le rétablissement de cette confiance nécessiterait notre reconnexion avec la citoyenneté (avec l’école comme institution clé), notre capacité à filtrer les canaux de transmission des informations, et une prise de conscience de la nécessité de notre implication pour faire valoir nos droits (selon lui, nous les considérons tellement acquis que cela nous désengage de la politique). 

Cet engagement citoyen devrait être soutenu par une meilleure communication des acteurs de la République, d’une part de façon ascendante et transparente, d’autre part sur des objectifs et horizons précis, afin de réduire les incertitudes. L’auteur pense en effet que rassembler nos divisions vers un projet commun et à travers des valeurs communes, grâce à un leadership humain et habile, permettrait l’expression rationnelle des diverses opinions et ainsi une meilleure et plus longue coopération. 

Enfin, David Manise conseille aux élus de déceler et d’estimer les préoccupations sous-jacentes des groupes “marginaux” et de sortir d’un schéma de coercition, de censure, voire de violence au profit d’une écoute bienveillante des différentes revendications, en démontrant qu’elles sont considérées. 

 

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Pour David Manise, “un arbre qui tombe fait toujours plus de bruit qu’une graine qui pousse” : à nous, dès lors, de planter les graines de cette forêt en comptant sur notre capacité à apprendre de nos erreurs, à tirer parti de nos diversités de croyances et opinions, et à coopérer pour trouver des solutions pérennes.


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